En réaction à l’effondrement de sa base militante, le Parti Socialiste a mis en oeuvre une grande opération de re-branding lors de son université d’été, Jean-Christophe Cambadelis, docteur en sociologie du marketing, nous en dévoile les grandes lignes en exclusivité:
« Societalia, tous unis pour le Progrès », c’est de vous?
“(rires) Hélas non, j’avais bien pensé au « Parti Sociétaliste” mais ça sonnait un peu lourd, même si c’est ce qui nous décrivait le mieux. C’est plutôt l’idée d’un stagiaire de Science Po qui a récemment rejoint nos rangs. L’intérêt de ce nom est aussi d’évacuer la notion de parti qui rappelle trop le 20ème siècle et une période guidée par l’idéologie que nous préférons tous oublier.
Pourquoi Sociétalia?
Tout simplement parce qu’il était difficile de maintenir l’illusion plus longtemps. Les gens ont compris que sur le socio-économique nous étions raccord avec l’UMP à 90%. Le FN nous a fait beaucoup de mal avec sa blague de l’UMPS parce que les gens se sont rendus compte que c’était largement vrai. Non, je crois qu’il faut clairement assumer notre vision néo-libérale. Nous l’avons adopté depuis bien longtemps mais sans jamais la revendiquer. Je crois qu’il est de notre responsabilité de faire amende honorable et d’admettre que le capitalisme est le système le plus abouti, point final.
Mais alors, qu’est ce qui vous différencie de l’UMP, comment comptez-vous vous démarquer?
Il nous faut nous recentrer sur ce que les gens peuvent identifier clairement, c’est à dire nos valeurs sociétales. Ne nous voilons pas la face, ce qui a constitué notre combat, outre la libéralisation et la désindustrialisation du tissu socio-économique français, c’est d’avoir mis en place des avancées sociétales qui constituent un progrès énorme pour l’humanité en général. Principalement à travers des mouvements qui ne sont ni plus ni moins que des émanations de notre parti, alors pourquoi ne pas les assumer clairement et les intégrer dans notre base militante?
Nous avons donc, tout logiquement, décidé de fusionner avec eux pour nous recentrer sur nos valeurs, et aussi regonfler nos effectifs qui avaient atteint un niveau historiquement bas! Et on se doit quand même d’avoir une base de militants si l’on souhaite conserver le titre de parti…
Qui sont donc les nouveaux élus? Si je puis dire…
Eh bien, vous les connaissez déjà, j’ai donc le plaisir de vous annoncer la fusion de notre mouvement avec SOS Racisme, Les Indigènes de la République, Ni Putes Ni Soumises, les Chiennes de Gardes, bien évidemment le mouvement LGBT avec qui nous partageons les valeurs les plus fortes et enfin, les FEMEN avec qui nous sommes parvenus à un accord financier. Pierre Bergé nous a proposé de rattacher d’office les abonnés au Monde, nous n’avons encore rien décidé. Nous aurions également souhaité que le Front de Gauche et le NPA nous rejoignent mais nous ne savions pas à qui parler pour négocier.
Ces militants associatifs n’étaient-ils pas déjà membres du PS dans leur majorité? Et donc en quoi est ce que cela vous permettrait-il de regonfler vos effectifs?
Ce que vous dites n’est pas totalement faux mais ce qui est important au final, c’est de simplifier la ligne de lecture pour nos électeurs. Nous devons répondre à l’émergence d’une “Union Sacrée” à droite qui regroupe pêle-mêle cathos et musulmans traditionnalistes, frontistes, dieudonnistes, soraliens et autres anti-sionistes d’extrême droite. Ça commence à faire du monde… Face à eux nous devons créer un front commun de valeurs progressistes que nos électeurs peuvent clairement identifier. Si vous n’êtes pas réactionnaire d’extrême droite, donc vous êtes pour le progrès, si vous êtes pour le progrès alors vous êtes avec nous! Je crois que nous assistons à une période de grande simplification des concepts politiques, les gens en ont marre des vieilles idéologies qu’ils ne comprennent plus. Avec « Societalia, tous unis pour le Progrès!!!” les gens comprennent de suite, personne ne veut retourner au moyen-âge.
Comment voyez-vous l’UMP s’intégrer dans ce schéma?
La porte est grande ouverte, s’ils souhaitent nous rejoindre, ils sont les bienvenus! Comme je l’ai déjà dit, nous partageons un socle commun pour la vision socio-économique. Nous avons déjà perçu des signaux positifs lors de la tentative de mise en oeuvre de la théorie du genre dans les écoles à laquelle ils n’ont pas montré une grande opposition, avant le lancement de la polémique, donc je pense que sur les fondamentaux, ils pourront nous rejoindre. Cela peut prendre un peu de temps mais ils peuvent y arriver.
C’est sur cette main tendue que nous conclurons cette entretien qui révèle un chamboulement du paysage politique augurant d’une nouvelle ère des rapports de force non plus sociaux, on l’aura compris, mais sociétaux.