Après plusieurs mois d’enquêtes, et l’action d’une femme de ménage plus assidue que les autres, a émergé le dernier écrit de Karl Slym, directeur général de Tata Motors, géant automobile Indien, dont le décès n’avait pas manqué de surprendre son entourage personnel et professionnel.
Toutes sortes de rumeurs couraient depuis la disparition surprise de celui qui avait programmé la révélation au Salon de Genève de la Tata NANO à air comprimé.
Si les mauvaises langues avaient laissé courir le bruit d’un assassinat commandité par des conglomérats automobiles internationaux, la découverte de la note de suicide de Karl Slym les exonère de toute responsabilité, même s’ils restent toutefois part de sa motivation à disparaître.
“J’ai fait une erreur!” C’est par ses mots catégoriques que débute la lettre de M.Slym qui explique pourquoi il a décidé de mettre fin à ses jours, moins de 40 jours avant la présentation officielle au monde du premier véhicule à air comprimé produit à grande échelle au Salon de Genève 2014, nous en publions aujourd’hui l’intégralité :
“j’ai pensé que le monde était mûr pour accueillir cette formidable invention de nos partenaires français (MDI) que nous avions eu la chance d’être les premiers à pouvoir distribuer sur le sous-continent indien, au grand bénéfice des habitants et de l’environnement.
Mais je réalise à présent que les répercussions de cette technologie sont tellement grandes qu’elles seraient capables de mettre à terre le système basé sur les énergies fossiles et mettre aux chômage les millions de personnes qui en vivent à travers le monde.
Je ne peux pas prendre la responsabilité de faire disparaître, du jour au lendemain, des millions d’emplois dans les secteurs aussi essentiels que ceux de l’énergie, de l’automobile et de la santé.
Le problème de cette technologie est qu’elle ne requiert pas assez de ressources, de main-d’oeuvre, et qu’elle ne pollue quasiment pas comparée aux technologies existantes. Elle s’inscrit donc à contre-courant du dogme actuel et provoquerait un effondrement du PIB mondial.
Elle libèrerait toute une partie de la population que l’on parvenait tout juste à contrôler en orchestrant une augmentation artificielle du coût des énergies fossiles et donc du coût de la vie en général.
Rétrospectivement, imaginer une société où le transport individuel et collectif verrait son coût divisé par 10 ou 20 me fait froid dans le dos.
Cela génèrerait automatiquement une reprise de la production et des échanges et donc de la croissance ainsi qu’une augmentation considérable de la qualité de vie des habitants de la planète, tous en réduisant drastiquement les impacts sur l’environnement.
On verrait donc une accélération de l’augmentation du nombre d’habitants de la planète, surtout si l’on fait disparaître cette source de pollution principale que sont les moteurs à explosions dont on sait aujourd’hui qu’ils sont responsables de millions de morts chaque année dans le monde.J’avais rejeté ces raisons par idéalisme mais je les comprends aujourd’hui.
L’humanité ne doit pas être libérée de la contrainte fossile et je m’en remets à la sagesse de mes concurrentes multinationales automobiles et nos partenaires banquiers et pétroliers pour poursuivre l’oeuvre qu’ils ont si bien accompli jusqu’ici.
J’espère ne pas avoir trop interféré avec l’histoire et que mes démarches de soutien de MDI, n’auront pas de conséquences notables sur l’évolution de notre civilisation.
La publication de cette lettre a provoqué de nombreux commentaires de tous côtés à commencer par ceux du représentant de l’UTAC (Union technique de l’automobile, du motocycle et du cycle), qui regroupe les constructeurs automobiles (à qui elle appartient).
Je salue la mémoire de M. Slym qui a su prendre une décision courageuse avant qu’ils ne soit trop tard. L’arrivée sur le marché de ce véhicule n’aurait servi les intérêts de personne. Cette technologie permettait d’économiser énormément en énergie fossiles, mais grâce aux dernières évolutions des techniques d’exploitations pétrolières, nous avons repoussé le pic de production des énergies fossiles et il n’y a donc aucune raison de remettre en cause le système actuel.
Certes les environnementalistes seront déçus mais ils ne font pas vivre grand monde économiquement parlant! Dans quel état serait le PIB si nous cessions d’y contribuer comme nous les faisons depuis des décennies?
Un argument qui ne tient plus d’après, Rob Hopkins, initiateur et spécialiste du mouvement de la Transition qui vise à se préparer au monde d’après les énergies fossiles.
“La non-distribution de cette technologie est une tragédie. Pour les hommes et la planète en général. Nous savons tous que les énergies fossiles sont de plus en plus difficiles à extraire et qu’à moyen terme elle ne seront plus économiquement accessibles. La Tata NANO était donc une réelle alternative au modèle pétrolier, beaucoup plus crédible que les véhicules électriques, beaucoup plus accessible et beaucoup moins polluante, au service d’une économie locale, solidaire et résiliente. On pouvait imaginer tout un tas de dispositifs à même de comprimer l’air de manière entièrement non-polluante telles des éoliennes par exemple et donc améliorer, sinon résoudre l’un des problèmes majeur de notre civilisation que reste la pollution automobile directe et indirecte. »
Ce stand quasiment vide, figurant parmi les plus en vue du Salon de l’Automobile de Genève, a donc manqué de peu de voir trôner en son sein le premier véhicule à air comprimé que l’humanité ait connu. 100km pour un euro d’électricité, c’est ce que les anglais-saxons appellent un “Game Changer”, une technologie de rupture qui signale le passage d’un monde à l’autre, mais dont l’adoption ne se fait pas sans soubresauts, ni sans victimes…